Le peuple aïnou

groupe d'Aïnous en 1902

Les Aïnous sont un peuple minoritaire du Japon vivant sur l’île de Hokkaïdo. Leur zone d’habitat traditionnel était beaucoup plus étendue : île de Hokkaïdo, nord de l’île de Honshu, îles Kouriles, sud de l’île de Sakhaline, régions dans lesquelles, venus du continent, ils se sont installés plus de 1000 ans avant l’ère chrétienne.

Leur origine est mal connue. Leur aspect physique différent des Japonais (taille plus haute, peau plus claire. ..) a fait supposer qu’ils étaient d’origine européenne. Cette hypothèse a cependant été démentie par des recherches approfondies qui proposent plusieurs origines possibles (Asie centrale, Sibérie, Asie du Sud …) mais toutes situées en Asie.

La culture aïnou

Quelle que soit leur origine, les Aïnous ont une culture plus ancienne que les autres Japonais (ils se sont installés au Japon 1000 ans avant les populations qui donnèrent naissance au peuple japonais moderne) et bien différente.

Religion : la religion aïnou est polythéiste et animiste. Les Aïnous croient en effet à l’existence de plusieurs esprits/dieux (kamuis) présents dans la nature et organisés en hiérarchie. En haut de cette hiérarchie :  Kamuy-Fuchi, déesse de la Terre, Kim-un Kamui, dieu des ours et des montagnes et Repun Kamuy, dieu de la mer, de la pêche et des animaux marins.

Aïnous dans les années 1860-1870

Les Aïnous n’ont pas connu l’organisation en état ni la vie urbaine. Les conditions climatiques assez rudes des régions où ils vivaient ont fait que leur économie était basée essentiellement sur la chasse, la pêche et la cueillette. L’habitat était rural et les villages (kotans) organisés en clans patriarcaux.
L’artisanat aïnou était assez développé (tissage, broderie, gravure sur bois …) tout comme le chant et la musique. Les Aïnous utilisaient d’ailleurs des instruments de musique spécifiques (mukkuri, tonkori). La danse traditionnelle aïnou a d’ailleurs été inscrite en 2009 au patrimoine immatériel de l’Unesco.

Après un certain âge les hommes ne se rasaient plus d’où les photos prises au 19ème siècle d’Aïnous arborant longs cheveux, barbes et moustaches abondantes. Les femmes se tatouaient avant le mariage.

Les Aïnous ignoraient l’écriture mais ils avaient une riche littérature orale représentée par des récits épiques appelés Yukars.

Les Japonais, au contact avec les Aïnous, ont transcrits leur langue en alphabet katakana. L’aïnou n’est pas de la même famille que le japonais et n’aurait d’ailleurs de parenté avec aucune autre langue : comme le basque, c’est ce que les linguistes appellent un isolat.

L’extinction progressive des Aïnous

Cette culture aïnou est maintenant presque éteinte à cause de l’assimilation forcée qui en a été faite par les gouvernements japonais successifs. Les premiers contacts réguliers entre Aïnous et Japonais ont commencés au 13ème siècle mais c’est à partir de l’époque de Edo (1600-1868) que leur territoire fut peu à peu colonisé et les Aïnous progressivement contraints d’abandonner leurs terres. Ils se rebellèrent à différentes reprises mais sans succès (révoltes de Shakushain de 1669 à 1672, de Menashi-Kunashir en 1789).

Le gouvernement Meiji (1868-1912) confirma cette volonté d’assimilation forcée des Aïnous par la loi sur « les anciens aborigènes de Hokkaïdo » adoptée en 1899. Les terres où vivaient les Aïnous passèrent alors sous contrôle du gouvernement japonais et l’attribution de la citoyenneté japonaise à l’ensemble des Aïnous signifiait la suppression de leurs lois et de leur organisation traditionnelles. La marginalisation des Aïnous se confirma et s’accentua dans les décennies qui suivirent, leur culture et leur langue disparaissant quasi-totalement. Les manuels d’histoire japonais allèrent même jusqu’à oublier de les mentionner !

vetements traditionnels ainous exposés en musée

Aujourd’hui, le nombre estimé d’Aïnous oscille de quelques dizaines de milliers à 200 000. Les difficultés d’estimation viennent de l’assimilation qui a été faite à la culture japonaise (tous les Aïnous portent maintenant des noms japonais), des très nombreux mariages entre Aïnous et Japonais (il n’y a quasiment plus d’Aïnous de souche) mais aussi de la volonté de certains Aïnous de cacher leurs origines pour ne pas avoir à subir de discrimination.

Une renaissance ainou ?

 

Ces dernières années sont marquées par une volonté de renaissance de l’identité et de la culture aïnou.

En 1994, Shigeru Kayano, Aïnou militant de la cause de son peuple fut élu député au parlement japonais. Son activisme permit le vote d’une loi de promotion de la culture aïnou en 1997 qui encouragea la création de différents projets et activités culturels. Kayano  prit sa retraite politique en 1998 et décéda en 2006 après avoir constaté que « notre situation s’est détériorée. L’injustice à l’égard des Aïnous n’a pas cessé« .

Si il avait vécu quelques années années de plus, peut-être n’aurait-il pas fait une déclaration si amère. En effet, le parlement japonais vota le 6 juin 2008 une loi reconnaissant que « les Aïnous sont un peuple indigène avec sa propre langue, religion et culture » et appelant le gouvernement à prendre des mesures pour aider les Aïnous à sortir de la pauvreté. Le porte-parole du gouvernement japonais reconnut à cette occasion que « les Aïnous ont souffert de discriminations et ont été contraints à la pauvreté en période de modernisation. »

un projet de drapeau ainou dans les années 1970

Un parti politique aïnou a été fondé le 21 janvier 2012. Son but déclaré est de contribuer à la formation d’un Japon multiculturel et multiethnique. A l’occasion des élections législatives du 16 décembre 2012, il a présenté un candidat à Hokkaïdo qui n’a recueilli que 1693 suffrages.

Quant à la langue aïnou elle a actuellement un statut un peu paradoxal : elle ne serait quasiment plus utilisée comme première langue mais plusieurs actions sont faites pour la promouvoir : signalisation routière bilingue dans les territoires aïnous, existence d’un journal en aïnou (le Aïnu Times). La chaîne Sapporo TV propose même des cours d’aïnou.

Quelques liens :

Vous avez aimé cet article ? Faites-le savoir :

Autres articles à découvrir :

  • Histoire résumée du Japon

    Histoire résumée du Japon pour mieux essayer de comprendre quand et comment se sont formées sa société et sa culture.

  • Les Japonais des fourmis ?

    L’image de fourmis ne vivant que pour le travail est un des clichés les plus tenaces sur les Japonais.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *