Ring (1998 à 2012)

Ring est un film d’épouvante sorti en 1998 qui a durablement influencé et relancé le cinéma d’horreur japonais. Il fit l’objet de différents remakes en dehors du Japon et eut plusieurs suites plus ou moins réussies.

Prélude

A l’origine de ce film, une histoire réelle : celle de Chizuko Mifune et Sadako Takahashi. Ces deux femmes ayant vécu au début du 20ème siècle avaient en effet attiré l’attention de Tokomichi Fukurai, enseignant en psychologie à l’Université de Tokyo pour leurs prétendus dons de voyance. Il se livra avec elles à plusieurs expériences prétendant montrer la réalité de leurs pouvoirs. Chizuko Mifune se suicida en 1911 après avoir été accusée de supercherie et Sadako Takahashi disparut.

Chizuko Mifune, la voyante qui inspira l'histoire de Ring

Cette histoire inspira le romancier japonais Koji Suzuki pour écrire Ring (le cercle) en 1991, roman racontant comment le journaliste Kazuyuki Asakawa est amené à enquêter sur les morts brutales et étranges d’adolescents survenues simultanément. Son enquête l’amène sur la trace d’une étrange K7 vidéo derrière laquelle se trame la rancune et la volonté de vengeance d’une jeune femme aux pouvoirs surnaturels assassinée trente ans avant.

fantôme traditionnel du folklore japonais qui a inspiré Sadako Yamamura

Suzuki écrivit une série de suites à son roman : Rasen (double hélice) en 1995, La Boucle en 1998 et Ring Ø (Birthday) en 1999. Le réalisateur Joji Lida fit une première adaptation en téléfilm de Ring en 1995 sous le titre Ring: Kanzenban. Mais cette première version fut complètement éclipsée par le film de Hideo Nakata  en 1998.

Ring (1998)

affiche de Ring 1
L’histoire : la journaliste Reiko Asakawa  (Nanako Matsushima) enquête sur une rumeur circulant dans les écoles, collèges et lycées de Tokyo à propos d’une mystérieuse K7 vidéo qui provoquerait la mort brutale après une semaine de ceux et celles qui l’ont regardé. Asakawa se rend compte peu à peu que cette rumeur est bien réelle, jusqu’à découvrir et visionner la mystérieuse K7 vidéo avant de se rend compte mais trop tard qu’elle a été rattrapée par la fameuse malédiction ! Croyant ne plus avoir qu’une semaine à vivre, terrifiée, elle appelle à l’aide son ex-mari, Ryuji Takayama (Hiroyuki Sanada)  pour découvrir la nature de cette malédiction. Leur enquête les amène sur les traces de la terrible Sadako Yamamura.

Contrairement au  roman qui avait eu qu’un accueil mitigé, le film Ring fut un véritable succès. Ceci s’explique en partie par les changements qu’apporta le réalisateur Nakata à la version littéraire. D’abord changer le journaliste Asakawa de sexe pour en faire une femme. Ainsi Ryuji Takayama à qui elle fait appel pour l’aider à conjurer la malédiction n’est plus comme dans le roman un ancien ami d’université mais son ex-mari ce qui donne un côté psychologique voire sentimental important au récit. Tout comme les efforts que fait Asakawa pour conjurer la malédiction qui sont en partie motivés par le désir maternel de protéger son jeune fils.

Autre changement important : une simplification de l’intrigue. La fin du roman introduisait en effet des éléments faisant penser que la malédiction mortelle de Sadako Yamamura était un virus mortel et inconnu ce qui éloignait du récit de fantôme vengeur traditionnel. Le film oublie ces éléments pseudo-scientifiques pour donner à Sadako Yamamura lapparence d’un Yurei, fantôme traditionnel des légendes japonaises qui foudroie ses victimes par sa seule volonté. La malédiction se transmettant toujours par la K7 vidéo fait cependant rencontrer de façon originale ce thème du fantôme vengeur traditionnel avec la technologie moderne.

Mais la véritable raison du succès du film Ring vient d’une ambiance lourde, pesante et terrifiante allant croissant au fur et à mesure qu’on avance vers le fameux délai fatidique d’une semaine. Et ceci sans aucune scène de violence, sans qu’on voit la moindre goutte de sang versée. On ne voit quasiment pas Sadako Yamamura, pourtant au centre de l’histoire, comme si ce qu’elle représentait était trop horrible, trop indescriptible pour être montré et ne peut être donc que suggéré : ses victimes retrouvées mortes avec le visage resté paralysé sur une expression de terreur, une lycéenne témoin de ce qu’a fait Sadako Yamamura et dont le choc l’a rendu folle….

Tous ces éléments vont de Ring LE film à voir pour les amateurs de cinéma d’épouvante. Son succès se manifesta par une adaptation en drama l’année suivant sa sortie et une réédition du roman en version manga. Le cinéma japonais vit dans les années suivantes plusieurs films d’épouvante inspirés directement et indirectement de Ring et des remakes en furent réalisés à l’étranger (Corée en 1999, États-Unis en 2002).

Les suites directes furent quant à elles plus ou moins réussies.

Suites … et fin ? (1998 à 2012)

Rasen (1998)

affiche officielle du film Rasen

La même année que le film Ring fut porté à l’écran le roman Rasen (double hélice), la suite du roman Ring.
L’histoire commence juste après la fin de Ring et montre comment Mitsuo Ando (Koichi Sato), médecin et vieil ami de Ryuji Takayama, est chargé d’autopsier le corps de ce dernier après sa mort face à Sadako Yamamura. Aidé de Mai Takano (Miki Nakatani), assistante et petite amie de Ryuji Takayama, il va  se retrouver entraîné à enquêter sur Sadako Yamamura et découvrir la nature de ses véritables intentions.
Au contraire de Ring, Rasen fut un échec commercial total et tomba vite dans l’oubli. Raison principale : alors que Ring avait totalement occulté le côté génétique et viral de la malédiction de Sadako Yamamura, cet aspect est central dans Rasen d’où l’impression que ce film est la suite d’une autre histoire. Les flash-backs montrant des scènes de Ring ne font qu’accentuer ce contraste.


Le récit dans Rasen donne l’impression d’un mélange bizarre de policier, de film noir, de science-fiction et d’épouvante et si on y ajoute un rythme très monotone, une ambiance sombre du début à la fin, une bande-son ultra-synthétique on comprend mieux pourquoi ce film fut un échec.
Et pourtant Rasen a peut-être été un peu injustement oublié. D’abord le rythme est tellement monotone car, Sadako Yamamura étant maintenant connue, il était de toute façon difficile de reprendre l’ambiance de suspense et de tension croissante du film précédent. Ensuite l’ambiance tellement sombre est conforme à ce que la fin de Ring évoquait et surtout la mise en avant du nouvel aspect viral et génétique de la malédiction de Sadako Yamamura peut être vu comme la découverte de la véritable nature de cette malédiction : si Reiko Asakawa, à la fin de Ring, croit qu’elle peut effacer la malédiction en montrant la K7 vidéo à une autre personne avant le fameux délai fatidique d’une semaine, elle est en fait manipulée et poussée par Sadako Yamamura à propager le virus mortel.

Si Rasen n’était pas sorti en même temps que Ring mais quelques années après, il aurait peut-être connu le succès.

Ring 2 (1999)

Affiche officielle de Ring 2

Suite à l’échec de Rasen, une suite fut demandée à Hideo Nakata, réalisateur de Ring : ce fut Ring 2 en 1999.
L’histoire commence juste après la fin de Ring et suit cette fois Mai Takano (Miki Nakatani), assistante et petite amie de Ryuji Takayama qui enquête sur la mort brutale de ce dernier face à Sadako Yamamura. Retrouvant la trace de Reiko Asakawa et de son fils elle découvre que ce dernier, au contact de Sadako Yamamura, a apparemment développé des pouvoirs similaires. Serait-il manipulé par cette dernière ? Parallèlement un médecin intéressé par le cas de Sadako Yamamura va se livrer à une série d’expériences et réutiliser la fameuse K7 vidéo maudite sans se rendre compte du risque qu’il prend.

Le principal mérite de Ring 2 est de reprendre une partie de l’ambiance si oppressante et tendue de Ring : l’ombre de Sadako Yamamura plane du début à la fin, toujours évoquée mais quasiment jamais montrée. Comme dans Ring, des scènes de véritable épouvante arrivent à faire dresser les cheveux sur la tête sans aucune véritable violence et sans que la moindre goutte de sang ne soit versée.

Malgré ça on sent quand même que Hideo Nakata a un peu manqué d’inspiration, surtout à l’impression d’absence de fil directeur au récit : la multiplication des intrigues donne parfois l’impression que le film est une succession de scènes indépendantes les unes des autres, parfois trop longues, qui ont été réalisées pour combler le temps nécessaire à la durée du film.
Ainsi certains événements arrivent sans que rien ne les annonçait, comme quand Mai Takano et le fils de Asakawa décident de partir sur l’île natale de Sadako, on ne sait absolument rien de ce qui motive cette décision.

Un exemple de scène particulièrement mal écrite est celle dans laquelle Sadako Yamamura apparaît à la télévision de la salle commune d’un hôpital psychiatrique, au fameux moment où elle sort de son puits et marche sur l’écran de télévision pour en sortir et aller foudroyer ses victimes : panique chez les malades, intervention du personnel hospitalier qui remet péniblement les choses en ordre …  et il n’est rapidement plus question de Sadako Yamamura, comme si elle avait disparue alors qu’elle était pourtant censée se matérialiser et tuer ses victimes.

Preuve de ce manque d’inspiration, certains éléments de l’histoire de Ring 2 ont été directement copiés sur Rasen : arrivée d’un médecin comme nouveau personnage tenant un rôle important, mort d’un des protagonistes par accident de voiture, scène finale se déroulant dans un puits.

Ring Ø Birthday (2000)

Affiche officielle de Ring Ø Birthday

Norio Tsuruta réalisa la quatrième adaptation au cinéma de l’histoire de Sadako Yamamura avec Ring Ø Birthday un an après Ring 2. A cette occasion, Tsuruta se réinspire de l’œuvre littéraire à l’origine de Ring en adaptant une nouvelle du recueil Ring Ø (Birthday) écrit en 1999 racontant des événements de la vie de Sadako Yamamura trente ans avant les évènements racontés dans Ring.
Nous découvrons Sadako (Yukie Nakama) à l’âge de 20 ans qui est une jeune fille très douce, gentille et timide mais déjà aux prises avec ses pouvoirs paranormaux hérités de sa mère défunte. Membre d’une troupe de théâtre, elle n’arrive pas à s’en faire accepter malgré tous ses efforts et l’amour que lui porte un des membres. Bien que ne pensant qu’à faire le bien autour d’elle, elle est victime d’intolérance voire de persécution.

L’histoire se présente comme une explication à ce qui a amené aux évènements étranges et meurtriers autour de la K7 vidéo maudite. Montrer la jeune Sadako Yamamura comme l’exact opposé de la Sadako meurtrière de Ring était un choix audacieux, de même que le fil directeur du récit qui tient beaucoup plus de l’histoire d’amour tragique que du scénario d’épouvante. Mais Tsuruta s’était peut-être rendu compte qu’il fallait renouveler l’histoire de Sadako en évitant de tomber dans une répétition de Ring et Ring 2. Pari réussi (du moins en partie) : le récit dans Ring Ø Birthday est bien réalisé, bien joué et ressemble à une tragédie grecque : même si on sait comment les choses vont finir, on regarde l’histoire avec intérêt et on se prend vite de sympathie pour Sadako, victime d’intolérance et de préjugés et qui fait pourtant tout ce qu’elle peut pour vivre normalement. Le côte épouvante n’est cependant pas oublié et le dernier quart d’heure voit une nette accélération du rythme ainsi que quelques bons moments de frisson.

Cependant, même après avoir vu Ring Ø Birthday jusqu’à la fin, on a du mal à imaginer cet ange de bonté devenir la future Sadako meurtrière. Peut-être parce qu’il était conscient de ce problème, Tsuruta a imaginé que Sadako était accompagnée d’un double incarnant ses tendances mauvaises et faisant le mal quand Sadako ne cherche qu’à faire le bien.

Ceci a quand même du mal à convaincre. Il aurait aussi paru logique que Ring Ø Birthday parle des moments de l’enfance de Sadako évoqués par flash-back dans Ring : rien de tout ça, de même qu’a été oublié le mystérieux père de Sadako évoqué aussi dans Ring.

Sadako 3D (2012)

Affiche officielle de Sadako 3D

En mai 2012, le réalisateur Tsutomu Hanabusa a réalisé une nouvelle suite à l’histoire de Sadako sous le titre Sadako 3D. J’avais été mis au courant de la prochaine sortie de ce film par Oli, le webmaster du blog échec et (ciné)mat consacré au cinéma japonais d’épouvante : voir Koji Suzuki, le romancier créateur du personnage de Sadako Yamamura à la signature du scénario de ce nouveau film me faisait espérer un scénario de qualité. Las ! Le film serait raté et n’a d’ailleurs pas eu de succès dans les salles obscures japonaises. N’ayant pas (encore ?) eu l’occasion de le voir, je ne peux pas en faire par moi-même une critique et laisse pour ceci parler l’article que Oli a consacré à Sadako 3D :

« L’atmosphère n’est presque jamais pesante, et Sadako passe son temps non pas à vous foutre les chocottes, mais à tenter de vous faire sursauter.(…) On a quand même l’impression que tout ce beau monde (réalisateur et producteurs) a en réalité cédé aux douces sirènes de la facilité…(…) Sur la fin, on s’éloigne même tellement du « film de fantôme » qu’on en vient à oublier que l’on visionne un reboot de la série RINGU… Paradoxalement, c’est à ce moment-là que j’ai pris le plus de plaisir (…). Le reste du temps, SADAKO 3D frise la correctionnelle, et manque de peu de sombrer dans le navet total. (…)SADAKO 3D (…) demeure plus ou moins regardable(…). Pour le reste…à force de creuser dans son puits, Sadako pourrait bien finir par en toucher le fond. »

Une suite à Sadako 3D (Sadako 3D 2) est pourtant prévue pour 2013.

Extraits vidéo

La bande vidéo de la K7 vidéo maudite dans Ring: Kanzenban, première adaptation télévisée du roman Ring (très fidèle à la bande-vidéo du roman) :

Les trailers respectifs de Ring, Rasen, Ring 2, Ring Ø Birthday et Sadako 3D :

Vous avez aimé cet article ? Faites-le savoir :

Autres articles à découvrir :

  • Long Love Letter (2002)

    Long Love Letter est un drama de 2002 mêlant scénario de science-fiction et aventure humaine.

  • Jyoou no Kyoushitsu (2005)

    Le drama Jyoou no Kyoushitsu raconte l’histoire d’écoliers de primaire victimes d’une mystérieuse et diabolique enseignante.

  • Kairo (1998)

    Kairo est un film très particulier où le récit d’épouvante sert de prétexte à une cinglante critique sociale.

  • Densha otoko (2005)

    Le drama Densha Otoko est une comédie romantique qui serait inspirée d’une histoire vraie.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *