Depuis l’accident nucléaire qui a frappé la centrale de Fukushima en mars 2011, se pose la question du risque d’exposition à la radioactivité quand on prévoit de voyager au Japon. Mais même après Fukushima – et à condition bien sûr de prendre certaines précautions – on peut voyager au Japon sans risque.
La centrale nucléaire de Fukushima-Daichi est située sur la côte du Pacifique, au sud de Sendaï et à 250 kilomètres à peu près au nord-est de Tokyo. La carte ci-dessous vous aidera à mieux situer :
Sachant que le Japon est un pays assez allongé du sud-ouest au nord-est, avec Okinawa à la même latitude que le Sahara, Tokyo à la même latitude qu’Alger, Sapporo à la même latitude que Nice, Sapporo et Okinawa distants à vol d’oiseau de 2244 kilomètres, on voit qu‘il aurait fallu que l’accident de Fukushima dégage autant de radioactivité que Tchernobyl pour que tout le Japon soit contaminé.
Or Fukushima n’est justement pas comparable à Tchernobyl, dont le nuage radioactif propulsé très haut dans l’atmosphère avait contaminé la plus grande partie de l’Europe : d’après Didier Champion, directeur de l’environnement à l’IRSN (Institut de Radioprotection et de Sécurité Nucléaire), « on peut dire que l’accident de Fukushima a libéré dix fois moins d’iode radioactif et trois fois moins de césium radioactif que celui de Tchernobyl. » En outre sous l’effet de vents d’ouest dominants, 80% de la radioactivité rejetée est retombée dans le Pacifique, le reste ayant contaminé principalement une zone de 50 kilomètres de long au nord-ouest de la centrale.
Dans la zone évacuée d’un rayon de 20 kilomètres autour de la centrale de Fukushima le taux de césium 137 va jusqu’au 15 millions de Bq (Becquerels) par m2, soit autant qu’à proximité immédiate de la centrale de Tchernobyl. Le phénomène dit des « taches de léopard » (dispersion aléatoire sous l’effet des vents et de la pluie) a fait cependant qu’on a relevé des dépôts de césium 137 allant jusqu’à 100 000 Bq/m2 au nord et à l’ouest de Tokyo soit à 250 kilomètres de la centrale de Fukushima (la question du maintien de la population se pose à partir de 1 million de Bq/m2). En étant extrêmement pessimiste en en considérant donc que toute cette zone géographique est dangereuse, il reste que la grande majorité du territoire japonais n’a pas été touchée par des niveaux dangereux de radioactivité.
Ceci est confirmé si on mesure la radioactivité non pas en Becquerels mais en Sieverts. La carte de mesure de la radioactivité de Haiyan Zhang (Japan Geigermap) propose ainsi un zonage détaillé du territoire japonais à partir de données venant du Ministère japonais des Sciences mais aussi d’universités, de collectivités locales et même de particuliers (les mesures sont faites en microsieverts par heure). Elle montre bien que sur l’ensemble du territoire japonais le niveau de radioactivité est largement en-dessous de celui de la radioactivité naturelle moyenne en France donc que la grande majorité du Japon n’est pas dangereuse.
NB : d’après le CEA la radioactivité naturelle moyenne en France est de 2,4 millisieverts par an et par personne (0,2739 microsieverts par heure) et l’exposition moyenne à la radioactivité dans l’ensemble du monde est d’après l’OMS de 3,1 millisieverts par an et par personne (0,3539 microsieverts par heure).
Avec 80% des rejets radioactifs de Fukushima retombés dans le Pacifique auxquels s’ajoute l’écoulement en mer des eaux contaminées, un problème important peut être la contamination de la chaîne alimentaire maritime. Mais d’après la revue Science du 26 octobre 2012, la majorité des poissons pêchés près des côtes nord-est du Japon présentent un taux de césium acceptable pour la consommation humaine (moins de 100 Bq/kg). Ce seuil est par contre dépassé pour les poissons pêchés au large de la préfecture de Fukushima mais la pêche est interdite dans cette zone ce qui limite fortement le risque de contamination de la chaîne alimentaire.
Cette question de la contamination de la chaîne alimentaire se pose aussi pour les productions agricoles. Plus de 10 000 analyses avaient été faites sur différents aliments dans les mois qui ont suivi la catastrophe de Fukushima : même si dans plus des deux tiers des cas aucune radioactivité n’a été détectée des productions d’épinards, de légumes frais et de riz (trois échantillons sur 3900 mesures) avaient quand même dues été détruites après détection de radioactivité supérieure aux normes. La contamination au césium peut être longue sur certains produits comme le thé, le bambou ou l’abricot.
L’IRSN publie régulièrement depuis mars 2011 un bulletin d’informations sur le risque radioactif à destination des résidents français au Japon. Le dernier en date, de août 2012, déclarait que « concernant le suivi de la contamination de la chaîne alimentaire, les résultats du 1er semestre 2012 montrent une amélioration sensible de la situation pour de nombreuses catégories de denrées (notamment les légumes, la viande d’animaux d’élevage et le lait) par rapport au printemps 2011, mais des concentrations significatives en césiums 134 et 137 continuent d’être mesurées régulièrement dans certains types de produits.
D’une façon générale, pour les ressortissants français résidant au Japon, l’IRSN maintient ses recommandation de bonnes pratiques alimentaires :
- limiter au maximum la consommation de denrées provenant d’un jardin potager ou d’un élevage familial, à moins que des contrôles n’aient été effectués
- laver soigneusement les fruits et légumes ayant été en contact avec le sol.
Aucune limitation sur la consommation ou l’usage de l’eau du robinet pour la préparation et la cuisson des aliments n’est à envisager.
Il est important de noter que la consommation occasionnelle de denrées contaminées même à des niveaux légèrement supérieurs aux normes autorisées ne présente pas un risque significatif pour la santé. »
Sources :
Fukushima et radioactivité : 1 an près
Fukushima : un an après, bilan express de l’accident nucléaire
Zonage des zones radioactives en France (arrêté du 15 mai 2006)
Carte de la radioactivité naturelle au Japon
Peut-on comparer Fukushima et Tchernobyl ?
Fukushima: la contamination au césium toujours élevée pour les poissons
Science et Vie, mars 2012
IRSN : informations pour les résidents français au Japon
Quelques idées reçues sur le nucléaire